jeudi 22 septembre 2011

L'Archipel radieux ( suite ) .


L'Archipel radieux (suite )

Au camp d’Arué la dernière séance avait les faveurs de l’équipe et c’est au nom d’une vraie solidarité qu'il en était ainsi.
Trois cuistots , trois copains de chambre , et les collègues administratifs resteraient à les attendre , la plupart s'accommodant de leurs horaires décalés , c'est ainsi que la bande au complet gagnerait la cathédrale au toit de palmes , elle restait soudée et fraternelle .
Au programme deux séances consécutives et tous les soirs, bien ingrat celui qui mégotait sur les bonnes dispositions du ministère , l’ambiance était festive , l’encadrement bienveillant.
Les soirées se prolongeaient tard bien après l'heure du ciné , à Papeete surtout où ils pourraient tomber sur des endroits de petites débauches et s’encanailler au fil de quelques-unes de leurs turpitudes .

Jusqu'à tard dans la nuit ....

Oublié l’archipel , paradis expéditif qui le vit un peu vaciller , aujourd'hui saisi par les insondables luxuriances de Tahiti , il y vivait souvent des nuits intenses , il se souvient toujours de ses formidables sensations olfactives , il n'oublierai jamais ce goût tellement particulier que procure le bonheur .

André commençait sa journée à 9 heures, terminait la première partie de son service à 14 heures 30 la reprenait à 18 heures pour s’en libérer vers 20 heures.
Les services de vaisselle et d’entretiens étaient assurés par une équipe de femmes tahitiennes , parmi elles deux bombes authentiques , que faisaient-elles trempant ainsi dans l'eau de vaisselle et comment avaient-elles pu accepter que l'on réduisit ainsi leur spectre !!
Certes ni la plonge, ni le service, ni les taches ménagères sont activités dégradantes , mais leur ravissant minois , le galbe de leurs hanches , leurs fesses oh combien joliment anatomiques et leur espièglerie minaudière méritaient sûrement d'autres destins et pourtant elles se contenteraient de faire se tourner en bourrique toute la brigade …
L’ordinaire était torride, André se trouvait plus que de raison dans leur ligne de mire , aussitôt il ressentait désir et fièvre , il prit l'habitude sur leurs demandes insistantes de les aider en fin de service à évacuer les poubelles.
Ils prenaient alors un petit chemin fleuri , puis ils contournaient le bâtiment avant que d’atteindre le petit seuil de la remise.
Le petit trajet n'était pas sans lui réserver quelques agréables surprises .
Ils prirent goût à ce petit rituel .
André jamais ne le regretta ...

Il arrivait quelquefois que l’ordinaire du jour ne satisfasse pas pleinement  les gourmandises de ses copains de chambrée.
Il prélevait alors quelques victuailles choisies parmi les plus rares , ces petits détournements donnèrent lieu à quelques ripailles tardives , doit-il confesser aujourd'hui quelques chapardages humanitaires , quelques resquilles ciblées .... Ah , saucissons , fines terrines , jambons crus , et bien d'autres délicieuses et rares gourmandises ...
Pour en terminer avec l'évocation culinaire, comment ne pas mentionner ici l'importance du repas dominical tellement attendu .
Il était fin , presque gastronomique , les cuisiniers mettaient les petits plateaux dans les grands , navarins , blanquettes , tendrons de veau , bourguignons , à volonté !!
Et que dire des fromages , desserts , toutes ces farandoles de tartelettes , mille feuilles , religieuses, babas , souris glacées , pâtes d'amande ou tête de nègre .... de quoi satisfaire bien de leurs envies gourmandes .
L’armée n’était pas chiche , le dimanche restait un jour extraordinaire , et sous ces latitudes, autochtones  et métropolitains se régaleraient du même pot .
Tous présentaient des humeurs et des dispositions heureuses , l’île jour après jour lui paraissait plus enchanteresse , le léger frisson de ses fleurs exhalait le parfum des suintements de la délicate poisse de leur nectaire.

La nuit serait paisible après ces quelques plaisirs volés à la providence, ils se seraient informés des dernières nouvelles en provenance de la métropole.
La radio passait en boucle ‘C’est extra » de Léo Ferré, André tombait sur ses fesses, l‘artiste victime de son génie avait-il commis par inadvertance un succès commercial !!
Texte génialement métaphorique , comme d'habitude mais était-il seulement toujours compris ?
Peu importe il rallierait à lui un auditoire tellement vaste !!
Puis le grand Léo reviendrait à ses premières amours ….
La belle mélodie, la belle chanson se turent paisiblement et la nuit Tahitienne enveloppa de ses douceurs le silence retrouvé du camp.

Noël Vallier .


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