mardi 10 juillet 2012

Sinistres tuiles ...


Le vent ce scélérat, le vieux vent pour me plaire
A cru devoir jeter hors du toit cette nuit
Deux tuiles indigo de terre cuite sonnant clair
Que notre ami parti pourtant bien posa … lui 

La charmante marquise qui lui fait révérence
N’ayant jamais vécu de telles simagrées 
Sous le poids des intruses se brisa en silence
Je le vis tard ce soir en longeant mon laurier 

Faut-il chose fortuite en tirer conséquences
Ou de Dieu doit-on craindre quelques vertes bordées
La bise de juillet pourtant douce à se pendre
Que ne l’a-t-il portée vers chez moi sabordée

Il est ainsi des faits qui ne font pas silence
Ou du moins sans un cri venus tels des marmots
Secoués pour la vie en quelques instants de transes
Gros-Jean comme devant vous laissent comme un sot

Il est choses fortuites des nuits sans importance
Qui du guet de la lune s’amusent farces et douleurs
Ils sont évènements les intrus quand ils dansent
Et si je ne sais rien ils se jouent de mes pleurs

Le vent ce renégat parjure d’un silence 
A jamais établi près du muret sans eux
Un soir d’été de juin Thierry et moi en France
Nos mains sur le basalte nous étions en ces cieux

Thierry parti si tôt et voilà que se barre
A peine ais-je pleuré à l’insu dans le noir
Cette glaise qu’il posa sur ces charpentes rares
Dis moi l’ami dis moi où étais-tu hier soir 


Noël Vallier



samedi 7 juillet 2012

Notre ami Thierry .


L'homme était sculpteur , l'artiste était tendre ...
Tendre au point de s'émouvoir à l'idée de fendre la pierre pour y dessiner au prix d'une terrible sueur le galbe parfait d'une incroyable chute de reins .....
Les formes ainsi faites , ouvertes jusqu'à l'indécence nous poussent à voir .
A voir remontant depuis cet orifice véniel les obstacles compliqués empruntés par tous les appétits de nos miels .
Cependant l'homme n'était pas ainsi .
Il indiqua lui même à quel point l'art était souvent moqué , vilipendé quelquefois , jamais il ne put se satisfaire des prescriptions redoutables de la rationalité , il se moquait je le crois du conformisme et aimait à rêver d'un monde chimérique conforme à la molécule inouïe , celle qui de longues années durant fustigea , ce qu’à Dieu ne plaise , le concert mauvaisement ordonné des différents ordres .
Il était singulier car obstiné , il était rebelle car indomptable , il était romantique car insoumis , respectable car impeccablement fidèle à ses convictions , ses idées , son grandiose idéal .
Les concessions n'étaient pas de son langage , encore moins de sa culture , il admit cependant que jamais son propos ne soit la plus irréfutable illustration de ce qu’il est convenu de nommer … la raison !! 
Thierry se coltinait la pierre, la pierre animée par son ardente passion, il prit nombre de ses éclats dans sa charmante gueule des jours durant, il se remplit les poumons de ses poussières insidieuses sans piper le moindre mot,  puis il quêta modestement (en réfutant toutes idées bassement nourricières) la reconnaissance, le partage,
Une place peut-être.
Il m’a été donné souvent de pouvoir caresser ses œuvres, je disposais en effet de ce privilège insigne, comme nombre de ses amis (es).
Chez nous trône sa pierre « philosophale » pourrait-on dire, sa première création une des plus abouties, un don mais un don du ciel.
Et pourtant jamais il ne voulu en entendre parler, du ciel veux-je dire, en effet l’artiste partit avec l’ami, le père, le mari, sur la pointe de ses pieds comme il était venu probablement, il réfuta tout au long de sa courte existence ce que du ciel tout un chacun peut légitimement espérer ….


Une sorte de signe ….


Ici je parle de l’artiste , de ses maillets , haches , masses , marteaux , gradines , pointerolles ciseaux , râpes  limes , perceuses , scies … et j’en oublie !!
De quoi mille fois se défaire d’un doigt, d’une main, d’un œil …


De cette ardente passion il ne tira que quelques gloires confidentielles , celles que consentent à livrer les esthètes et les pairs , cette beauté là n’est point l’affaire du grand public , cette foule peu argentée que l’on peut comprendre quand elle croise l’art et qu’elle ne s’arrête point , quand elle ne fuit pas !!


Ses œuvres furent quelquefois merveilles, toujours estimables, le travail de l’artiste fut harassant.


Thierry partit en se répandant sous un ciel fondamentalement bleu mais contrasté, les quatre points cardinaux donnèrent du ton en effet, la douceur de l’air fut absolument unique, une brise imperceptible sembla suspendre ses cendres, là, juste au-dessus de l’érable quand Mom sa semeuse adorée, la main tremblante les dispersa.


Thierry, « dans le ventre des espagnoles il y a des armes toutes prêtes, toutes prêtes et qui attendent ». 


Nous t’aimions bien, tu sais ??!!




Noël Vallier.