lundi 31 octobre 2011

L'Archipel radieux ( suite ) .


L'Archipel radieux ,

Ah ces longs moments passés à rêvasser à l'ombre tiède , si près des foisonnements fleuris , un peu en repli André paressait aussi , les narines saisis par des parfums en sieste , le regard dévoré par l'étalage d'une ribambelle de beautés .
Dans les allées du marché de Papeete les étals regorgeaient de fruits , des centaines d'effluves mêlés suffoquaient le chaland , c'était une sorte de vertige , un festival de couleurs , une fête ..

La petite caméra super 8 offerte par son aïeul  traînait hélas trop souvent dans son armoire , il s’en était servie pour immortaliser les beautés du petit atoll de Tureïa , cette pépite l'avait inspiré si fort qu'il avait  consommé toutes ses pellicules , liquidé son stock et bien avant son retour sur Papeete !

Les fêtes de juillet approchaient et la capitale polynésienne préparait cet évènement avec une ferveur et un enthousiasme extraordinaires .
Les courses de pirogues , les danses tahitiennes accompagnées par les rythmes sourds des tambours et les plaintes amoureuses des ukulélés , les tamourés lascifs magnifiés par la plastique parfaite des danseuses et danseurs , les chorégraphies somptueuses , ce spectacle foisonnant peu à peu devenait quasiment immatériel la foule captive , saoule de liesse danserait et chanterait jusqu'aux premiers frémissements de l'aurore ...

Des touristes gras et mal fagotés , chemises tahitiennes enfilées à la hâte sur leur chair grasse , débordante se   déhanchaient , grotesques , et venaient resquiller un peu du bonheur des anges .
Les danseuses sourires figés chaloupaient leurs hanches , elles frôleraient ( suivant les termes établis du protocole )  les panses considérables de ces clowns , leurs femmes aussi niaises se tordaient en tout sens  vilaines canes , et semblaient telles de vieilles catins attendre que quelques danseurs montent …

Les sottes !!

Il était tard , les bedonnants touristes s’étaient sûrement vautrés sur quelques sofas , épuisés par leurs pitreries , les dernières heures de la nuit seraient ainsi préservées.
Après plusieurs heures de danses ininterrompues les artistes firent la pause , ce court répit ne troublerait point l’extase , au repos danseuses et danseurs se déplaçaient encore comme Cupidon …
Puis tard dans la nuit ils repartiraient vers Papeete , instruments soigneusement emballés , ils ne leur faudrait pas moins de trois trucks pour embarquer matériels et artistes !!
Ce soir là  André et deux de ses amis miraculeusement resquillèrent chacun une place …
André ne cessa jamais de me confier de si belles images sur les odeurs et les miracles de la nuit Polynésienne  que je ne peux résister à l'envie de vous en conter encore !!
Il s'émeut toujours quarante ans après à la seule évocation du vent , ce vent tiède fouetté par la vitesse de déplacement du truck , cette brise lui caressait la nuque , elle fuitait par les ridelles de l‘engin , cet alizé  charmant , il en rêvait déjà quand il était gamin avant que les heures ne soient chambardées , en plein été sous les platanes , près des étoiles à l’heure des grillons ...
André et ses collègues finiraient leur nuit au « Bounty » seul endroit de la ville ou pouvait se concevoir un noctambulisme délicat et préservé .
André invita une poupée .
Ils se collèrent l’un à l’autre , quittèrent précipitamment la piste , puis ils se bécotèrent goulûment s'abandonnant sur l’une des banquettes profondes du night-club.
Elle parlait un français impeccable , ils sifflèrent un whisky-soda pendant l’attraction.
Une belle blonde s’effeuilla minaudant jusqu'au dernier accessoire et ce fut le moment excitant de sa nudité la plus expressive .
André ne ressentit jamais le moindre trouble , il préférait plonger dans les yeux humides de sa danseuse …
La piste était bien trop encombrée, elle le prit par la main ils remontèrent deux ou trois rues puis elle l'invita au seuil de sa porte ....


Noël Vallier












Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire