jeudi 20 octobre 2011

L'Archipel radieux ( suite ) .


L'Archipel radieux (suite) .

Les plus charmants ou les plus acharnés parviendraient peut-être à capter un peu de leurs attentions mais ils seraient confrontés à d’effrontées espiègleries , parades très élaborées qui des jours durant se joueraient de leurs impatiences avant que ne surgissent les premières frustrations.
Un flirt , André n’en demandait pas davantage , il lui suffirait d'un flirt , mais d'attentions délicates elles n'en réservaient qu'à leur miroir ...
Étrange miroir présent comme une ombre , cette ombre partenaire exclusive de leur charme , de leur sensualité , conséquence heureuse de la fronde ininterrompue d’un soleil amical , intrépide …
Il attendrait quelques heures , quelques jours , pour enfin pouvoir frôler du bout de ses lèvres le goût de l'épice sucrée salée du velouté de leur peau .
Les militaires n’étaient pas en odeur de sainteté , leur présence sur l’île était jugée assez sévèrement , leurs projets leur paraissaient singuliers et hostiles , certains n’hésiteraient plus plus à dénoncer un comportement despotique !!
Seules les barrettes blanches ou dorées flanquées sur des épaulettes plates impeccables trouveraient grâce ces symboles de pouvoir élégamment affichés ne laissaient jamais la population indifférente et pouvaient alors  circuler dans des haies de "Oh" les héros des anciennes campagnes !!

André se trouvait ce soir là sur la plage grise près du « Royal Tahitien » c’était la fin de l’après-midi , le soleil rasait encore l"écume , s'abandonnaient sur sa peau quelques moiteurs perlées , il s’approcha des lèches éclatées et s’assit les fesses collées sur le sable.
Le petit ressac des vagues le faisait amusément rebondir, cette gymnastique marine dura le temps d’une grande bouffée d’iode , puis il se laissa sécher par le petit vent marin .
Il regagna le camp vers 18h30 , toujours un peu saoulé par l’odeur vanillée des amandes pulvérisées venue depuis Papeete…

Les haut-parleurs d’Arué diffusaient en boucle Otis Redding .
Le rythm and blues connaissait ses heures de gloire, et les vinyles de la collection «Terrible" ou
" Formidable" » vampirisaient le genre , tournaient sur le diamant du camp tous les succès du maître .
Nos amis ne s’en lassaient pas !!
L'homme , l'artiste remuait les coeurs et les tripes , André n'en pouvait plus d'espérer " Try a little Tenderness" à ses oreilles le titre constituait l'une de ses orfèvreries principales parmi bien d'autres joyaux et c'est ainsi qu'une méthodique sarabande faite de géniales lignes syncopées toucherait sans jamais cesser l'âme et le coeur du contingent .
Le cinéma du camp  projetait un soir donné  « Les Tontons flingueurs »  la petite chambrée avait fait une conséquente provision de bières Hinano , nos amis étancheraient leur soif au rythme des crochets , des directs ou des uppercuts de Lino Ventura .
Lino tombait les coups comme la pluie disperse ses gouttes , sur le même rythme les amis tombaient les canettes , et la société Hinano de se frotter les mains , la 68 2 c ne faillirait pas , elle contribuerait à sa modeste mesure à l'aide au maintien de l’emploi local sur ce rafraîchissant secteur économique !!

Ils avaient décidé après le cinéma de se rendre à Papeete , au « Bounty » plus précisément , c’était la dernière navette militaire, ils reviendraient en truck.
La route de la plage entre Arué et Papeete était sur tout son long bordée par les stands de marchands de brochettes , le Drive-in voisin avait comme à l'accoutumée rempli ses tribunes , en chemin les sensations ne changeaient guère , étourdis d’ivresses tropicale  juchés sur leurs petits nuages nos amis s'en allaient en conquête !!
La fraîcheur fidèle du district de Pirae une fois encore leur caressa le visage.

Le Drive-in du district d’Arué qui se situait à quelques centaines de mètres du camp envoyait de l'écho, Mélodies nord-américaines , musiques traditionnelles locales , elles ne cessaient de titiller leurs oreilles chargées du souffle parfumé des alizés , cette brise nocturne qui traînait dans son sillage des odeurs de monoï fin et de berlingots.
André y voyait souvent défiler ses amours , celles du cinéma des années 50 et 60 , l’enceinte du Drive était comme une arène , et depuis l'espace des automobiles montaient des volutes de fumée de cigarettes blondes jusqu'aux tribunes pour s'y mélanger et soudainement s'y perdre .
L’écran surdimensionné n’en finissait pas d'envoyer ses lumières vives très haut vers les cimes des cocotiers comme des éclats parfaits d’arc en ciel .
Que la fin du film soit funeste ou délirante elle était toujours ponctuée par de grands éclats de rires , rires détachés presque fuyants , rires redoutables et les ravissantes polynésiennes à peine vêtues que de faire tourner en bourrique tous les hommes du stade !!
A deux pas du Drive en bordure de plage les marchands de brochettes piquaient sur des jonchets en bois de menus morceaux de viandes , après cuisson ils enrobaient l’ensemble d’une moutarde douce , le rendu visuel était agréable et la préparation fort appétissante.
Les baraques ambulantes fournissaient sans répit , l’humeur était bon enfant , par petits groupes les festifs du soir trouveraient vite les meilleurs coins de bringues !!
Il connut souvent pareille ambiance , les bâtons frappaient à l’unisson la peau de requin tannée des Pahus et cette cadence animale entraînait le fol , l’incendiaire roulement de hanches des insolentes danseuses .

La soirée s’était prolongée deux heures durant , André n’était plus seul , il tenait dans ses bras une ravissante   tahitienne , elle était fine , tendue comme une liane , l'iris de ses yeux pur comme la transparence bleutée de l’océan , elle lui caressait la nuque tendrement il ressentit une sorte une fièvre.
Ils s’embrassèrent longuement puis elle disparu ….
Il s'en retournerait vers Arué le cœur gros , cueillerait sur sa route quelques pétales de tiaré , les réduiraient en charpie afin d’en tirer tout le suc.
Puis il s’en enduirait le visage et le cou ...


Noël Vallier.























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