lundi 16 janvier 2012

L'archipel radieux ( suite ) .

L'Archipel radieux ( suite ) 

La fête attendue du père cent approchait, le moment et le propos n‘étaient plus pour ces quelques heures de préparations aux louanges habituelles et à la dévotion que tous ne cessaient jamais de rendre à ces terres bénies par la grâce et le soleil.

Et pourtant ce n’est pas sans raison qu'il adviendrait que de ces cent jours avant la date du retour soit enfin consacré un temps concomitant de fêtes ….

De quoi pouvaient-ils se réjouir avant leur retour en métropole qui ne soit jamais offensant à l’endroit de ces vieux granits ensemencés dés l’aube de leur vie par des rhizomes éternels, offerts, toujours épanouis et menés en terre par toutes les forces de la providence ??!! 
Ils ne se réjouiraient point et goûteraient du calice des fleurs en lapant leur nectar, et pourtant la petite poste du camp et son vaguemestre connaissaient de fréquentes mises à contribution, le courrier en partance affluait, enveloppes aux effigies polynésiennes, cartes postales charmeuses et papiers à lettres vélin jouant avec la transparence de quelques sceaux délicatement reproduits sur le velours de son grain. 
Ressentaient-ils les premières impatiences du retour ?? pas vraiment !!

André éprouvait un certain mal à se remettre de l’expérience avortée de son séjour à Tureia, il ne cessait de s'appesantir sur le sort de cette aventure trop vite interrompue, il pensait mais peut-être pensait-il mal que ce petit atoll devait être le clou de toutes les grâces possibles, pourtant aucun témoignage concordant ne témoigna jamais de cette vérité qu'il espérait tellement, au mieux pouvait-il renchérir sur ses premières impressions il faut alors dire qu'aucune d'elles n'était indépassable, s'agissait-il d'en juger par la puissance de leur épure ou de leur dépouillement somptueux ... 

Longtemps après il apprendrait les ravages du nucléaire, partagerait la détresse de la population de l'atoll celle des atolls voisins tous ramifiés à Moruroa lieu d'expérimentations de la puissance de la peste blanche que l'on comparait volontiers à un champignon surgit depuis l'écume une fois dégoupillées les unes après les autres toutes les procédures ...

Si Tahiti était une profusion de luxuriance, une sorte de bavardage interminable avec les anges, ses atolls lointains au ras de l’écume captaient tant d’azur et d’exubérance que les cocotiers qui n’en pouvaient plus ivres de bonheur s’étaient figé sur leur plus belle posture, tendus comme le bois d’un arc à la manière d’une prière. 

La nature généreuse ne savait pas !
Tahiti avait formidablement disséminé son précieux patrimoine et pour chacun de ses archipels elle avait concocté un formidable caractère et si quelques hommes de temps à autre trahissaient leur terre ils ne cessaient de tourner en rond s'abreuvant à la même source une fois revenus de leur vain périple.
Les hommes cherchaient-ils des remèdes ??
Probablement d’hypothétiques saluts économiques et qui pouvait leur en vouloir de tenter de monétiser leurs forces et leur énergie, leur puissance de travail et leur vaillance ??
Ils reviendraient finalement au village toutes illusions perdues, retrouveraient femme et enfants pour vivre l’ordinaire épatant de leur sublime insularité.

Aujourd'hui les productions locales sont valorisées, renforcées, sauvegardées quelquefois, l’autarcie des petites îles et des atolls n'est plus un atout certes elle est hélas devenue une conséquence peut-être, mais que pèsent vraiment les mirages et les vacuités proposés par la capitale polynésienne dans l'ordre économique d'une telle société ?!

Et le père cent n’en pouvait plus de sonner la charge !

Les passeports seraient revisités, on y mettrait quelques coups de tampons ils reprendraient ainsi de leurs belles couleurs !! 
Le vaguemestre du camp faisait feu de tous bois, en sa qualité exceptionnelle de vérificateur comptable il assurait les premiers contrôles de conformités des malles, ces précieuses malles qui achemineraient effets personnels, nacres, bénitiers, souvenirs, et dont le retour vers la métropole assuré par voie maritime précéderait de quelques semaines leur départ.

La métropole avait beau leur montrer à nouveau le bout de son nez, dussent-ils retrouver au cœur du mois de janvier les neiges épaisses et heureuses de leurs montagnes ou de leurs vallées et de s’en réjouir ils se délectaient encore du miel que la providence tant décrite coulait à l’envi !!


Noël Vallier

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